Souffle Mots

Concerto pour un Coquelicot

26th décembre 2013

Concerto pour un Coquelicot

Salut !

En ces fêtes de fin d’année je tenais à vous souhaiter un Joyeux Noël. Sous la demande de Jacky je vous présente aujourd’hui une sorte de conte écrit en octobre. Cela m’a pris un matin lorsque j’avais envie d’écrire, j’ai commencé sans savoir où cette histoire me mènerait vraiment, ce qui est très rare chez moi ! J’ai écrit ce texte sur l’air de la musique du film Origine.

Bye et bonne lecture.

Concerto pour un coquelicot

Sur un air de Mozart le monde s’était éveillé. Il avait entrouvert les paupières et, à moitié ébloui par le jour, sur la toile noire de ses pupilles, des notes avaient éclos. Ses yeux refermés les avaient regarder s’éteindre lentement comme se dissipe sur la peau le flamboiement du fer chauffé à blanc. Lorsque les rideaux avaient été tirés, doucement, son visage s’était un peu crispé afin de laisser à ses yeux le temps de s’accoutumer à la lumière. Il aimait cette heure du matin où seule la nature s’activait. Au premier coup d’œil, par un jour sans vent l’immobilité semblait totale et le monde muet. La fraîcheur du matin se glissait alors par la fenêtre ouverte avant de s’insinuer sous ses vêtements telle une main qui éveille le désir. D’une profonde inspiration il se donnait à elle, avec passion, et la laissait pénétrer chaque parcelle de son corps. Tous les jours elle lui redonnait vie, goutte d’eau qui ranime une fleur évanouie.
Accoudé ensuite au rebord de la fenêtre, écoutant la nature, cette dernière avait le temps de s’habituer à sa présence. Ils étaient de ces amants qui, après avoir étanché leur désir s’allongent l’un à côté de l’autre sans mot dire, écoutant juste leur respiration se répondre. Dans le souffle humide du matin résonnaient les souvenirs de la rosée et rien qu’à voir l’horizon rougir sous son regard il savait que le Soleil venait de s’éveiller il y a peu de temps. Toutefois il fallait que le vent soulève soudain la jupe des arbres, fragile dentelle d’automne, pour qu’une flamme s’allume au fond de ses yeux. Dans le simple bruissement des feuilles, murmure de la nature ou soupir contenu, sa violence maîtrisée et sa soif de vie étaient perceptibles tandis que, dans le noir de ses pupilles le vent tournoyait, passait d’un arbre à un autre en gouttant le plaisir de la vitesse et d’un coup l’effleurait, chant de liberté. Sa résistance à terre, la porte de chez lui claquait alors et ses pieds nus dévalaient la cage d’escaliers.
Les marches froides qui s’enroulent sur elles mêmes.
Un piano.
Sa respiration qui s’accélère, résonne entre les murs.
Le violon s’éveille.
Derrière la porte de l’immeuble, le chant d’un oiseau.
Une flûte lui répond.
Ses pieds nus sur l’herbe humide de rosée.
Et dans sa tête un air de Mozart.
Il se déplaçait toujours avec grâce, sans bruit superflu, comme si quelqu’un l’observait.
L’écoutait.

Tableau de Thaddäus Helbling

Son regard était étrange, perçant comme les griffes du tigre et pourtant aussi doux que son pelage. Parfois sa vue se brouillait pour se perdre dans le néant et il semblait que plus rien ne pouvait le ramener parmi les Hommes. En réalité il ne vivait pas tout à fait dans leur monde, percevant différemment les choses qui nous entoure. C’est pourquoi, si on se laissait happer par son regard on pouvait y voir, au milieu des mondes déjà éclos, la lumière d’un bourgeon d’univers. Quelque fois si on l’apercevait au cœur de la foule on avait l’impression qu’il n’y était pas à sa place et que son esprit était ailleurs, en équilibre entre deux mondes. Alors, comme le pont joint deux terres qu’une rivière a séparées, il s’était construit une passerelle entre les univers puis se l’était appropriée, invisible aux yeux de tous, immuable. L’essence de la vie.
C’était la respiration du nouveau né et la course du loup ; le chant du vent et le balbutiement du ruisseau ; c’était l’éclair dans la nuit et la pluie tambourinant sur les vitres.
Son nom était Musique.
Dans le salon trônait un piano, adossé contre un mur dans un angle, comme un enfant qui, dans une réunion d’adulte, tenterait de se faire oublier. La pièce avait beau être lourdement décorée, chargée d’objets de décoration et de peintures, il attirait directement l’attention. Pour certains c’était parce qu’il  détonnait dans l’ensemble, d’autres mettaient en cause la noirceur de son revêtement, trop dure pour le regard. Néanmoins on sentait bien au fond que là n’était pas la raison. Peu de personnes osaient l’approcher et encore moins le toucher, non pas que cet instrument éveilla la peur ou le dégoût mais plutôt un respect mêlé de gêne. Il dégageait une aura invisible qui venait chercher notre âme pour lui murmurer à l’oreille des paroles de vérité. Cependant sans l’aide d’un interprète nul ne les comprenait et ne subsistait dans les cœurs que le sentiment étrange que quelque chose d’important se jouait autre part. Un seul être pouvait détourner l’attention du piano. Dès son entrée dans la pièce c’était comme si un lien s’établissait entre lui et l’instrument. Ce lien, bien qu’invisible, était perceptible de tous et au fond d’eux ­ car jamais ils n’auraient osé le dire aussi clairement, certains n’en ayant pas vraiment conscience ­ une voix murmurait que le nouveau venu n’avait pour le piano aucune gêne mais qu’il y avait entre eux une relation d’égalité et, presque, de mutuelle affection. Toutefois, pour que les gens sentent que leur questions allaient enfin trouver des réponses,  il devait s’asseoir en face de lui, ses doigts effleurant sa surface lisse et noire. S’ils avaient du respect pour le piano, leurs sentiments envers l’interprète étaient plus mitigés : mélange de peur et d’envie inavouée.
Il y a des vérités que l’Homme ne voudrait jamais entendre mais qu’il guette comme la bouche entrouverte attend la goutte d’eau dont le contact aura la douceur du baiser mais qui ne fera qu’attiser la soif et l’envie, insatiable désir.
La vérité n’embrasse pas. Elle mord.

Wikicommons

Son amour envers la musique était de celui que l’on porte aux femmes : elle faisait parti de lui mais jamais ne lui appartiendrait. Ce n’était pas sa volonté. Sa sauvage liberté, malgré sa façon de se donner laissait toujours intact son mystère et nourrissait sa passion. Une image dans un miroir ne satisfait que la curiosité des yeux. Parfois on aurait presque pu la voir danser dans son regard tant ils étaient proches. Puis un jour elle disparaissait, entraînant dans son sillage quelques gouttes de pluie au goût salées. Ou peut ­être était-­ce par ses larmes qu’elle le quittait.
Face au piano, ne s’asseyant jamais au milieu du siège mais toujours à une de ses extrémités, l’inspiration avait alors la place de s’asseoir à ses côtés. Il composait seul, dans l’intimité, tel la rose pousse en silence sous le couvert de la végétation avant d’oser se présenter à la vue du Soleil. On aurait dit un de ces peintres qui testent sur l’aube leurs couleurs ­protégés du sommeil de la nature avant de trouver le bleu de l’azur. Parfois c’était comme si les notes venaient d’elles mêmes. Fermant les yeux, ses doigts trouvaient seuls le chemin des touches. Cela partait souvent d’une caresse, d’un effleurement ; éveil d’un piano et du désir d’une femme. Il écoutait chaque note et ajustait ses accords comme on écoute la respiration de l’autre pour percer l’indicible avant de faire glisser ses mains le long de ses hanches.
A chaque accord correspondait une émotion que les notes s’amusaient ensuite à moduler, virgule entre deux mots qui les sépare et les éclaire. Peu de personnes le virent un jour composer mais toutes, si elles firent bien attention, s’entendirent sur une chose : il ne composait pas la musique, il la vivait. Imperceptiblement son corps entier se déplaçait au rythme des notes comme le sable se meut au rythme des marrées.
Comme on se mort les lèvres pour étouffer les soupirs.
Puis un jour ce fut la tempête. C’était un de ces matins que l’on n’oublie jamais. Le monde à travers la fenêtre était flou, déformé par la pluie ruisselant à sa surface et la nature semblait ne jamais vouloir s’éveiller. Il pleuvait tant qu’on ne l’entendait même plus respirer. Alors comme pour combler le silence, il s’était assis en face du piano et avait fermé les yeux afin de laisser le monde alentour le pénétrer. Cependant pas un son n’avait émergé de la pénombre. Était-­ce son cœur qui soudain s’était accéléré ou la pluie qui avait redoublé ? Tout se trouble dans ma mémoire. Je revois les émotions le submerger et les notes déferler dans son esprit. D’où venaient-­elles ?
C’était la tempête. Le vent soulevait les feuilles d’automne et venait s’écraser contre les arbres. La terre mugissait et les branches ployaient. Les notes avaient cessées de le guider. Devait-­il conter la colère du vent ou la peur de l’arbre ? Les ténèbres des nuages ou la danse des lanternes ? Son corps tremblait et était pris d’un mouvement de bascule tandis que ses mains avaient trouvé refuge entre ses cuisses. Soudain la diversité des notes auquel se mêlait une infinité d’accords le frappa comme autant de gouttes de pluie. Et ce fut le vide. Un trou béant aspirant les certitudes et la confiance : Ses yeux couraient de la droite vers la gauche et de la gauche vers la droite, sautaient d’un nuage pour tomber dans la nuit puis glissait vers ses mains immobiles.
Mozart s’était tu et pleurait.
S’étant doucement levé, petite note que l’on aurait griffonné, il était sorti dans la tempête et avait attendu, assourdi par le bruit du vent, que le calme ne revienne. Tout semblait si lourd, gorgé de l’eau de pluie. Si lourd dans sa poitrine.
C’est alors qu’il la vit, coincée entre deux dalles de béton au milieu de la chaussée. Un coquelicot. Une de ses pétales était tombée au sol et son corps, si voûté, semblait tenter de la ramasser.
Jamais ils n’auraient dû être là. Ses cheveux collés contre son visage gouttaient sur ses épaules et ses mains étaient glacées. La fleur, sous son regard était belle, seule au milieu de ce monde gris. L’interprète s’accroupit à ses côtés. Combien d’épreuves aurait­elle encore à subir ? Combien de tempêtes et de pieds qui la fouleront ? Il aurait voulu lui parler mais quelque chose l’en empêchait : une mélodie, aussi faible que les souvenirs d’un rêve. En se levant le vide au fond de son cœur disparu, comblé par une petite fleur et la certitude des notes à venir : Celles de la différence.
Il allait composer pour un coquelicot, pour toutes les pétales tombées au sol et les espoirs envolés ; pour un bourgeon éclos dans le berceau de l’erreur et des millions de cœurs égarés.
Pour qu’un jour, à la vue d’une fleur quelqu’un sache qu’il n’est pas seul.
Alors Mozart reviendrait.

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5th novembre 2013

Les avions de Damas

Salut !

Ça y est je suis nancéenne ! Maintenant à chaque fois que l’on me demande d’où je viens je ne sais plus que répondre ^^ Paris ?  Beausoleil ? Pourtant j’appartiens aussi à Marseille et la Bretagne.

A Nancy…il fait froid et pour rentrer chez moi j’ai l’impression d’être à l’autre bout du monde. Bon je me plains mais il y a des avantages à être en école d’ingé : il y a beaucoup moins de boulot (d’un côté ce n’est pas possible d’en avoir plus qu’en prépa). Néanmoins c’est étonnant comme on le remplit ce temps libre !  Jusqu’à manquer de temps !

J’ai quand même plus la possibilité d’écrire. Je vous présente alors aujourd’hui un texte écrit en septembre, à la suite d’un événement dont vous avez tous certainement entendu parler. Ce thème m’est venu de Jacky, que je remercie.

Bye et bonne lecture !

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Les avions de Damas.

Je refuse…

Ces mots que l’on nous dicte, crissement de la plume sur la feuille tandis que s’envolent des avions de papier. Ne les voyez-vous pas tourbillonner ? Ils portent sur leur dos les rêves d’enfants égarés.

Je refuse…

La ligne droite précédant le point, chemin rectiligne de nos vies ; le pliage à angle droit, copie conforme d’un modèle prédéfini. Les rêves donnent à l’avenir une courbe unique.

Je refuse…

La pluie tombant sur les feuilles et l’espoir qui glisse. Tous ces corps alignés, ces avions de papier. De leurs lignes coule de l’encre.

Je refuse…

Les pieds qui foulent les feuilles et froissent les rêves pour ne plus jamais les entendre voler. Comme il est doux le bruit des plumes caressant l’air ; et simple, lorsqu’elle est à terre, d’écraser la vie. Ils devaient avoir peur de ces oiseaux en papier pour que leur bottes soient, si vite, maculées d’encre.

Je refuse…

L’asservissement des consciences, ces regards qui se détournent du ciel pour se pointer sur le sol et nier l’existence d’un battement d’aile, d’un frémissement au fond d’eux même qui les appelle et les effraie : « Et si j’avais levé les mains, en coupe, pour les rattraper ? » Poussé par la tempête même la raison peut chavirer.

Je refuse…

D’accepter.

Je refuse…

De me taire.

Wikicommons, Jordanbaker30

C’était le 21 Août. Le jour de mes 20 ans et celui de la chute des oiseaux de papier.

C’était le 21 Août : je faisais la fête quand d’autres mouraient. J’ignorais. Suis-je pour autant moins coupable ?

Depuis vingt ans j’ai couvert des pages et des pages d’encre ; des feuilles et des feuilles qui ne savent pas voler, qui n’ont pas de vie. Peut-être autant que le nombre d’avions écrasés sur le sol. Comme ils sont lourds leurs corps inertes gorgés d’eau, presque autant qu’une plume gorgée d’encre sur laquelle repose le poids des responsabilités.

Qu’écrire ? J’ai oublié. La nuit tombe et je ne distingue plus les avions. A peine le frôlement de la plume, un battement d’aile surgi du passé.

A quoi bon graver l’horreur sur la feuille alors qu’elle est là, si proche et si loin, dans le crépitement des radios et les pixels des télévisions ?

Je refuse.

Ce sont des rêves que je veux écrire , un peu d’espoir à suspendre aux ailes des avions en papier. Je veux souffler avec ma plume, souffler si fort qu’un instant ils s’envoleront au dessus des nuages en pleurs, de l’autre côté de l’océan. Petite lorsque je me réveillais en sueur d’un cauchemar il y avait toujours dans mon cou le souffle chaud de ma mère, rassurant.

Tout cela n’est rien, juste un peu d’encre et une feuille. Mais peut-être que grâce à eux, si l’on m’entends, je pourrais donner vie à mes avions de papier.

Pour les voir s’envoler.

Wikicommons, Moondyne

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23rd août 2013

A la poursuite du papillon

Salut !

Les vacances se terminent, elles furent courtes mais bien remplies et j’ai pu fêter dignement mes 20 ans ! Cette année je vais à Nancy, à l’ENSAIA (sauf modification de dernière minute), une école d’agronomie.

Le texte que je vous montre aujourd’hui a été écrit après les écrits, durant le week end de la pentecôte, léger répit avant la reprise des cours. Pour l’écrire je m’étais installée dans le jardin du foyer à cette période où le temps semblait hésiter entre la pluie et le soleil. L’idée de ce texte m’a été donnée par Jacky, fidèle lecteur de ce site.

Les photos qui l’accompagnent ont été prises au bois de Boulogne et au Crouesty en Bretagne cet été.

J’espère qu’il vous plaira,

Bye et bonne lecture !

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A la poursuite du papillon

Il y en avait deux. Deux cages. Une à quelques centimètres de moi et l’autre à plusieurs mètres. Presque alignées dans l’horizon courbe de mon regard on aurait dit qu’elles se répondaient. Peut-être regrettaient elles la distance les séparant, deux sœurs exilées ; ou bien pleuraient-elles cette absence, ce vide au fond d’elles, papillons envolés.

Seules subsistaient quelques pétales tombées du ciel, d’un nuage en fleur ou d’un arbre qui s’éveille, souvenir d’un temps déchu, d’un amour qui s’est mû en bruissement d’aile. Instant d’éternel.Puis la pluie avait commencé à battre la mesure et des gouttes à glisser le long des barreaux, comme si elles souhaitaient les enlacer, les rendre aussi fluide qu’elles l’étaient. Dans les cages même la pluie se fanait.

L’éphémère d’une vie ne se capture pas.
Ni la douceur du soleil,
Ni la tourmente d’un orage,
Ni le murmure de l’eau à nos oreilles
Pas plus que le pépiement des oiseaux ;
Ni les regards qui se croisent, floraison du désir,
Ni les corps à l’abandon.
Et jamais l’envol du papillon.
Alors pourquoi cette plume dans ma main ?

Soudain il était apparu, étrange vision dans un paisible jardin. Sa fourrure avait le gris des nuages, être sans contours qui gronde mais ne fait reculer les murs, masse sombre où perçaient deux yeux me fixant, prisons des mondes.

Je n’essayais pas de le caresser. On n’apprivoise pas la liberté.Alors tout devint flou, eau qui embrume nos regards, dilue la réalité tel l’encre sur ma feuille, images troubles de surfaces qui s’étirent et se compriment dans le creux de nos pupilles, comme un rêve pris de folie ; une distorsion de l’esprit…je cours.

Mes griffes pénètrent dans la terre meuble sur laquelle je prends appui pour mieux m’élancer. Un battement de paupière puis tout disparaît : les murs encerclant le jardin, les habitants, les voitures et le bruit assourdissant de la ville. Il ne reste que la route déserte bordée d’immeubles si grands qu’ils semblent masquer le ciel.
Mais les papillons toujours plus haut s’élèvent.Je sens tout mon corps en mouvement, chaque muscle, chaque fibre, le vent qui glisse autour de moi, semble me happer ; l’humidité encore présente sur la fourrure et les gouttes d’eau qui s’envolent. Prise de vitesse.

Alors dans le silence de la ville fantôme naît un orchestre. Écho d’un cœur ou de battements d’ailes ?

Lentement les forêts succèdent aux villes, les plages de rochers aux falaises escarpées, les déserts brûlants aux plateaux enneigés. Tout se mélange et se confond, les paysages et les saisons, les flutes et les violons.

Je vois des lacs de glace couverts du sang de l’automne, des dunes ensevelies sous des pétales de roses…deux cages qui volent en éclats, des murs qui s’effondrent, des étangs de verre qui se brisent telles les gouttes d’eau sur ma feuille, des barreaux qui fléchissent puis perdent toute consistance.
J’entends un loup qui hurle à la Lune de le laisser s’envoler rejoindre les papillons, une bête humaine qui refuse les frontières et les murailles, les limites de l’imagination, ce rêve en cage qu’un enfant laisse s’enfuir, le temps de quelques lignes, de quelques paysages…Et puisque le loup ne peut s’envoler, le papillon sur ma plume vient se poser.

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13th juillet 2013

Insaisi-sable

Salut !

Ça y est j’ai enfin fini mes concours, enfin les oraux parce que les écrits ça fait déjà longtemps ^^ Toutefois je crois que je ne me sentirais vraiment en vacances que lorsque j’aurai les résultats et s’ils sont positifs. Je vous présente alors un texte que je qualifierais de paysage état d’âme. Il a été écrit en Mars durant les vacances de février (cherchez la logique).

C’était un soir où je cherchais désespérément une idée, et alors que je pensais m’arrêter sur une tentative infructueuse, un paysage a commencé à se dessiner dans mon esprit et les mots à s’y poser pour le décrire. La fin, je l’ai écrite un matin lorsque j’étais avec une amie (merci Myrtille !!), j’avais une telle envie d’écrire qu’elle m’a dit de le faire et j’ai tout fini en une heure environ, cela me plaisait tellement !

J’espère que ce texte vous plaira.

Bye et bonne lecture.

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Insaisi-sable

Tout commença par un désert, par une chaîne de montagnes sans couleur, rides d’une nature albinos ; par des dunes qu’on aurait décalqué un peu trop vite, entre deux battements de paupières, simples vagues muettes. Je revois cette poussière, insaisissable, comme les rêves qui nous glissent entre les doigts, sans forme, presque immatériels. Des falaises.

Tout n’était qu’immobilité apparente, albatros qui suspend son vol comme on retient sa respiration tandis que dans le secret d’un esprit se réinventent les mondes et se forgent les illusions d’une société. Je trace sur les dunes les contours flous de quelques idées, mirages sur du papier froissé.

Wikicommons

Je me souviens de cette feuille blanche, livide. De la peur. Des lignes quadrillées d’un miroir émargé, perforé où il est si simple de se perdre comme on s’égare dans un désert, reflet d’un soleil nouveau-né. Je ferme les yeux pour ne pas me brûler.

Dans un ailleurs une pointe de métal menace la feuille, aiguille figée…et les minutes s’écoulaient, se brisaient sur l’écueil d’un mot avorté, asphyxié. Océan d’aridité.

Dans ma main l’inspiration est de sable.

Puis le Soleil était devenu ocre, coloré de ce rouge qui tend vers la nuit, et j’avais vu se profiler à l’horizon l’ombre de nuages, comme un brouillard sur mon visage. Ils avançaient, silencieux, nuages de poussière que les sabots d’une armée invisible auraient soulevé.

Il me suffisait d’abaisser les paupières pour animer le manège, les faire quitter leur socle de pierre et enfanter la vie telle une goutte d’eau fait fleurir un désert : je revois les puissants muscles des chevaux se tendre, leurs foulées s’allonger, les cavaliers rabattre leur visière et sur l’encolure se pencher. Je ressens le contact du sable qui se tasse sous mes pieds, la vitesse qui m’appelle…et sur les dunes de papier apparaît l’ombre d’une plume hirondelle.

C’est simple de voler, si simple. Battre des ailes et s’élever. Imaginer. Entrevoir d’un peu plus près la chevauchée, s’y rêver.

Soudain c’est la tempête et je me perds. Tout n’est plus que mouvement, ivresse de l’instant, tourbillon de poussière qui se répand sur un paysage hors équilibre. Chute libre.

Les chevaux disparaissent tandis que sous le vent les dunes s’éveillent. Suis-je en pleine mer ou sur un désert ? Je ne vois plus rien, ni le Soleil que masquent les nuages ni le sol qui se débat sous la poussière. Respiration qui s’accélère.

Alors je condense tout, en un mot, en un point, agonie d’un poème. Je replie mes ailes contre mon corps : plongeon. C’est la descente vers un horizon qui n’est plus, vers un paysage en mutation, des visages inconnus, fantômes de cavaliers anonymes. C’est entrer dans un monde sans frontière, sans interdit, un monde où tout naît du contact de la peau sur l’eau, de quelques ondes aux allures de dunes. Un monde inscrit au fond de moi, indélébile.

Ce soir une goutte choit sur la feuille. Est-ce de l’encre ou un peu d’eau salée ? Glisse-t-elle de ma joue ou de ma plume ? Ce soir dans le désert le vol de l’hirondelle perce les nuages et la terre s’abreuve comme le papier se gorge d’émotion.

Ce soir mon cœur crie la moisson.

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17th mai 2013

Lettre à un enfant

Salut !

Je viens enfin de finir les écrits de BCPST, quatre jours de répit et c’est reparti pour les révisions des oraux !

Entre temps je viens donc vous montrer un de mes derniers textes, écrits durant les vacances de Noël.  C’est celui dont je vous avais parlé dans l’article sur l’émission de radio. J’ai déjà songé à en faire une suite et avais commencé un moment avant de passer à autre chose. Si j’achève la suite bien sur je la joindrais. Mais pour l’instant ce texte se suffit à lui même.

Si vous avez des questions bien sur n’hésitez pas à les formuler, je serais ravie d’y répondre !

Bye et bonne lecture.

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Lettre à un enfant

«Pourquoi utilises-tu toujours le mot « plume » ? » quelqu’un m’a un jour demandé.

Sur le coup je n’avais pas su répondre, « ça sonne bien, me disais-je, c’est un peu moins moderne ». Faux. Mauvaise réponse. Quelque chose en moi n’était pas d’accord…ou plutôt quelqu’un : toi.

De tes petits doigts tu tiens le bout d’une plume et lisse son duvet. On dirait l’aile d’un oiseau frémissant avant son premier envol. Elle est grande, plus longue que ta main ; si longue que tu t’imagines chatouiller les étoiles avec, dessiner un sourire malicieux sur le visage ovale de la Lune et peut-être même oser caresser le firmament. Pour toi un vulgaire stylo de cours ne changera jamais la face du monde, si petit, si maladroit, il ne peut écrire qu’une rature en devenir.

Mais une plume ! C’est tout autre ! C’est une lueur au bout de tes doigts qui me laisse rêver que la magie existe encore. Grâce à elle j’ai dans le cœur un enchanteur.

Il y a quelques années tu as cessé de grandir et je t’ai vu t’éloigner comme les femmes de marins assistent, désemparées, au départ des navires sur des océans en colère. Petit à petit elles les regardent disparaître à l’horizon, point blanc qui s’éteint dans la nuit tandis que les astres prennent le relais et leur rappellent ces fragments de vie égarés aux quatre coins des mers, ces souvenirs d’enfance qui fondent et laissent sur la langue un goût amer.

Alors tu es là à me fixer, dans un petit cadre photo, sur le haut de la bibliothèque, sourire recroquevillé dans un étroit tiroir au allure d’alvéole où le nectar est extrait d’émotions. Le cœur comble le vide de passion.

Plus je te regarde et plus ton visage devient flou. Je ne distingue plus la couleur de tes yeux ni celle de tes cheveux. Dis moi petit, es-tu un Soleil ou une Lune ? Sur le tableau les couleurs se confondent et se mélangent.

De ton image rien n’est figé, contours émoussés d’une aurore qui disparaît ; tout n’est que mouvement perpétuel, éternité d’un battement d’aile. Pourtant je pourrais peindre chaque détail de ton sourire, chaque esquisse, chaque ébauche qui tous les jours me rappelle celui des anges que je n’ai pas connu mais qui veillent en moi, robustes comme les pavés d’une chaussée millénaire sur lesquels on s’appuie, ignorant de leur histoire.

Je lève ma plume. A quoi bon écrire ? Les mots ne viennent plus comme avant, brise qui s’essouffle. Ils choient goutte à goutte sur la terre brûlante d’un désert. Ébullition. Ils se croisent et s’entrechoquent en moi. Création. As-tu seulement conscience de la douleur de se rêver magicien quand on tient dans ses mains une baguette si fragile qu’à chaque phrase elle manque de se briser ? J’ai peur des virgules solitaires au allure de barbelés, des interrogations stériles qu’aucune réponse ne peut combler, de la disgrâce des mots qui sonnent faux et de la courbe un peu trop prononcée de ces lettres imprégnées de vérités.

« Passe moi une feuille Petit ; j’ai de l’encre aux coins des yeux. »

Alors j’écris et dans ce corps qui ne peut te répondre tu hurles en silence ton désir de liberté, tu hurles à briser les murailles qui t’encerclent, à enflammer la terre, tu cries ton refus de la société, ta haine et ta douleur à ces étoiles qui t’ont menti, tu cries et je t’enlace dans mes bras :

« Bien sûr que les fées existent, j’en héberge une tout au fond de moi. »

A cet instant où tu souris je t’aime, comme on aimerait un enfant qui dort, sans remord. Toutefois tes paupières sont toujours grandes ouvertes et tu me fixes : « Raconte moi une histoire. »

J’ai sommeil cependant je m’accroupis contre le mur, ce mur recouvert de tapisserie, si fin qu’un léger courant d’air s’infiltre et me fait frisonner. Tu es là en face de moi, tes genoux ramenés sur ta poitrine, juste en dessous de ton menton. Tu te balances d’avant en arrière, tic-tac mécanique de ma vie.

« Je ne sais pas parler petit, je ne sais qu’écrire, tu t’en souviens, c’est toi qui me l’a appris.

- Écris moi des histoires. »

Tu as peur. Légers tremblements. Ce soir je t’invente un monde, promis ; ce soir on s’enfuit à deux. Toutefois l’imagination a un prix : ne regarde pas mes doigts quand j’écris, j’ai dans la paume des éclats de verre.

Je ferme les yeux et me laisse bercer par ta lente respiration.

« Écoute le roulis des vagues, leur brusque ascension des rochers puis leur calme retraite. Cependant il n’y a ni embruns ni grève sur laquelle ils pourraient s’échouer. Il n’y a que le tourbillon des nuages qui s’écrasent contre les falaises comme des roulements de tambour précédant la tempête ; et au loin des éclairs. Non n’ai pas peur Petit, c’est notre monde, un monde rien qu’à nous. Regarde ce village complotant avec le ciel, à chacun de nos mots nous y déposons une pierre. Imagine ces petites maisons bien douillettes, les feux dans les cheminées et les volets colorés. Aux toits des chaumières sont suspendus des croissants de lune. Y a-t-il des fils ? Je ne les vois guère. Peut-être ceux de soie des araignées. Imagine des portes peintes à même les murs, des portes couleurs arc-en-ciel aux poignées rondes qu’il suffirait de faire pivoter pour changer de monde, pour changer d’histoire. Imagine… »

Mais tu dors déjà. Alors de mes mots je te tisse une couverture de rêves.

Certains croiront, ignorants, que tu es cet enfant que j’ai été il y a quelques années, que tu n’existes plus. Certains me diront de t’abandonner, de grandir, d’être adulte. Pourtant en chaque personne c’est toi que je cherche comme on guette avec espoir l’horizon et le retour des navires.

D’un petit coup de plume tu transperces les murailles. Tu es l’absence éternelle et cette présence continue à mes côtés, tu es de ces papillons que je regarde voler sans pouvoir les attraper. Si je touchais tes ailes je t’enchaînerais ; comme on enchaîne à des contes les fées.

Alors vole.

Vole comme les oisillons et les enfants. Du bout de tes ailes, du bout de notre plume.

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17th mars 2013

Passage à la radio !

Salut !

Je fais ce petit post afin de vous avertir d’une chose : je vais passer à la radio ! (quoi je répète le titre, pas grave ^^).

Tout a commencé à la Toussaint par la rencontre d’un auteur, Pascal Payen Appenzeller, qui m’a alors proposé de passer à son émission de radio. Je tiens en passant à remercier Jacky et son frère qui ont permis cette rencontre. C’est ainsi que lundi 4 mars a été enregistrée cette émission, juste après la fin de mes cours et avant que je ne saute dans le train pour rentrer chez moi. Bien sûr je remercie aussi Pascal Payen Appenzeller pour tout le temps qu’il m’a accordé…et que j’espère il m’accordera encore ^^ !!

Cette émission sera diffusée sur Radio Courtoisie les 29 et 30 mars.

Ce post a également pour but de diriger les futurs lecteurs qui souhaiteraient obtenir la version complète ou simplement relire les textes dont il est question dans cette émission.

Textes cités dans l’émission (pas dans l’ordre, je ne m’en souviens plus bien):

- Théâtre de mon âme

- Aquarelle

- Censure de l’imposture

- En bleu marine

- Rosée

- Sur le fil de l’horizon

- Lettre à Oscar Wilde

- Lettre à un enfant

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Bye et bonne lecture / relecture.

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20th février 2013

Croquis

Salut !

Je sais, cela fait longtemps, voir très longtemps que je n’ai pas posté, encore cette prépa ! Ce texte a été écrit en août et début septembre. Pour moi ce poème en prose correspond parfaitement au titre, un croquis, car j’ai tenté de mettre par écrit les images que j’avais dans ma tête. J’espère que cela vous plaira.

Les deux photos ont été prises lors de mes vacances en Bretagne l’été dernier (eh oui source de nombreuses photos !)

Bye et bonne lecture.

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Croquis

J’ai rêvé.
J’ai rêvé à un ciel couleur de rouille et à un océan de fer chauffé à blanc, tempête d’écume. j’ai griffonné dans mon esprit, image un peu floue, les contours tremblants d’une muraille plus longue que l’horizon pour percher ensuite sur les créneaux de la plus tour, la silhouette mouvante d’un enfant. Ses jambes se balancent doucement dans le vide, comme s’il battait la mesure, comme s’il comptait les secondes ou les battements de son cœur.
Je me souviens de son regard attentif posé sur ma bougie, cette petite veilleuse que j’ai allumé pour avoir moins peur de l’obscurité. Il observait la flamme comme on fixe le Soleil qui descend dans le ciel, quand on sait que la bougie va se consumer et couper ses longs cheveux dorés un peu rougi par les doux baisers d’été.
J’étais moi et j’étais ce rêve à la fois, ce monde à la frontière du réel naissant derrière mes paupières mi-closes. Il fallait que je garde un peu les yeux ouverts, juste assez pour laisser s’infiltrer quelques raies de lumière et attendre, avide, le contact brulant des étincelles sur mes pupilles couleur de neige ; comme le blanc papier attend la caresse de l’encre, sous corps ouvert à la nuit. Chaque goutte qui glisse éveille un frison. Flocon. Doucement je plonge ma main dans l’océan. Quelques remous l’agitent, papier froissé, puis le calme revient. Silence. petit à petit, comme imperceptiblement, l’eau tiédit autour de moi. Est-ce la chaleur de ma peau qui s’échappe en soupirs paisibles ou ma bougie qui sans bruit se noie dans les ténèbres de l’onde ?
La cire s’écoule dans l’océan et la flamme prend des allures de jeune femme à la longue robe blanche qui s’embrase sous le soleil couchant. Elle danse tandis que le vent se lève. Alors je couds de la dentelle à la surface de l’eau, tel l’aiguille de ma plume se joue de l’écume, tisse son tableau. Avec des mots.
Depuis qu’elle est apparue au fond de mes yeux son regard ne la quitte plus ; on dirait un oiseau qui a oublié comment déplier ses ailes à trop rester sur la berge, qui ne sait plus comment rejoindre le Soleil, un oisillon guettant le vide sous ses pieds. Peur de s’envoler.
Je l’imagine se lever, doucement, comme s’il risquait d’effrayer les étoiles qui se cachent encore derrière un ciel qu’on brûle, tendre la main à un songe, l’inviter, juste le temps d’une danse, d’un baiser et d’un levé de Lune. Il n’y a pas d’âge pour séduire les rêves.
Ses pieds valsent sur une muraille entre deux océans ; pour une flamme qui se meurt et enfante des astres ; pour cet espoir qu’il enlace, une main sur sa taille et l’autre dans ses cheveux enflammés ; pour ce rayon de lumière qu’il voudrait posséder comme un souvenir d’éternité ; comme le regard des femmes que l’on aime en secret.
Alors elle s’accroupit doucement, sa robe ondule et s’étire à la surface de l’eau. Elle s’accroupit comme pour embrasser un enfant qui réclame des histoires, comme on passe une main dans ses mèches folles, derniers remous ; comme on inspire profondément avant de souffler la bougie qui s’éteint sans bruit.
Mais l’enfant noie le silence, se raccroche aux astres. Il les saisit du bout des doigts puis les attire à lui, étoiles filantes ; il les cache sous l’horizon pour qu’elles le rassurent la nuit et alimentent sa palette de rêves aux couleurs d’encre.
Qu’importe si ce soir ce n’est qu’une ébauche de tableau : demain elle reviendra.

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