Salut !
Je pensais avoir fini cette magnifique rubrique sur notre expédition mais non ! Tout ayant commencé par une lettre, tout doit aussi se terminer par une lettre…
Aujourd’hui je vous présente donc la lettre ouverte qu’avait écrite Marine R. et qui lui avait permis comme à moi de gagner ce voyage et de vivre une expérience unique. N’hésitez donc pas à lui dire ce que vous en pensez !
Bye et bonne lecture.
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L’Arctique fond, on doit en payer l’addition
En effet, les nouvelles ne sont pas bonnes, et dans mon cœur, comme partout maintenant, il fait chaud. Oui, j’ai chaud pour la biodiversité de l’Arctique, qui est en train de fondre, autant au sens propre qu’au sens figuré. Alors je me suis décidée à prendre ma plume pour m’adresser à tous ces gens qui vivent sous le même toit que moi, mais qui pourtant sont aveugles à la situation dramatique dans laquelle est plongée notre planète. Des gens dans la rue se plaignent que l’on s’intéresse plus aux ours polaires qu’à leurs problèmes personnels. Pardon ?
Alors je m’adresse à vous, lecteurs de Nice Matin, même si j’espère que certains d’entre vous partagent mon opinion.
Car si les ours ne vous intéressent pas, sachez que la fonte des glaces en Arctique est préoccupante pour toutes les espèces présentes sur Terre. En effet, il se trouve que dans les glaces de l’Arctique sont enfermés des tonnes et des tonnes de réserves de méthane, puissant gaz à effet de serre ayant un pouvoir réchauffant 20 fois plus puissant que le CO2, et la fonte des glaces libère ce gaz.
Mais peut-être ne savez-vous pas vraiment ce qu’est « l’effet de serre »… c’est un phénomène thermique. L’atmosphère laisse passer une partie des rayons du Soleil, qui viennent frapper le sol. Réchauffé, celui-ci renvoie des rayons infrarouges qui sont piégés par l’atmosphère. Il y a alors une isolation de la planète et un réchauffement général. L’effet de serre n’est pas forcément quelque chose de négatif, au contraire. Il maintient la température de la planète pour nous permettre de vivre, nous et les autres espèces vivantes.
Cependant, l’effet de serre devient trop important. Tout d’abord parce que la glace renvoie la majorité des rayons du soleil, à l’inverse de la mer qui absorbe entre 90 et 95% de leur chaleur. La banquise restante va donc fondre plus vite à cause de la mer qui, réchauffée, chauffe la banquise également. Cette différence de réflexion est due à leur différence de couleur, comme lorsque vous avez plus chaud quand vous portez un T-shirt noir que quand vous en portez un blanc.
Aussi, plus de gaz sont envoyés dans l’atmosphère à cause de notre pollution, ce qui contribue a accentué l’effet de serre. C’est pourquoi il est important de recycler, prendre le vélo au lieu de la voiture, éviter de jeter nos déchets par terre…
Alors avec cette augmentation de température due aux gaz envoyés dans l’atmosphère, imaginez si des tonnes d’un des gaz les plus puissants dans son accentuation de l’effet de serre étaient libérées à cause de la fonte des glaces !
Ainsi, la température a augmenté de 3°C depuis le début du 21e siècle, soit quatre fois plus que la moyenne mondiale, qui est de +0,6°C. C’est la région du monde la plus touchée par le réchauffement. La banquise a déjà perdu 30% de sa superficie totale depuis 1960, et son épaisseur a diminué de 40% sur la même période. Aussi, la calotte glaciaire qui recouvre le Groenland a commencé à fondre elle aussi.
Ne pas réagir, c’est ignorer notre environnement. Ne pas réagir, c’est renier notre planète. Ne par réagir, c’est manquer de courage. Ne pas réagir, c’est se dérober à nos responsabilités. Ne pas réagir, c’est admettre que nous ne sommes pas aussi intelligents que nous le prétendons. Ne pas réagir, c’est tout simplement inacceptable.
Et peut-être n’avez-vous rien à faire de la dégradation de la biodiversité en Arctique, mais elle n’est que l’exemple de ce qui arrivera surement sur toute la planète. Vous parlez des ours, mais êtes-vous vraiment au courant de la menace d’extinction qui plane au dessus d’eux ? La banquise fond, réduisant le territoire de chasse du plus grand prédateur de la planète et, même s’il est bon nageur, il se trouve qu’il doit nager de plus en plus loin pour passer d’une banquise à l’autre. Or de plus en plus d’ours se noient d’épuisement, déjà affaibli par le manque de nourriture dû à la réduction de son territoire de chasse. Savez-vous que depuis 1985, l’ours polaire a perdu en moyenne 80 kilos de sa masse corporelle ? Et si ce n’était que ca !
Les eaux de l’Arctique, polluées à cause de nos activités, contaminent le plancton, qui est la source de la nourriture dans la chaîne alimentaire. Cette pollution accumulée fait que l’ours est lui aussi contaminé et stock la pollution dans ses graisses, qui sont sa réserve de nourriture. Or la femelle alète ses petits à partir de lait provenant de ses graisses, donc les oursons sont contaminés dès leur plus jeune âge, entraînant un cycle sans fin. Et encore, quand les réserves en graisse de l’ourse ne sont pas suffisantes, les oursons souffrent de malnutrition et risquent la mort. Alors comment survivront les ours sans leurs territoires de chasse ? Sans compter les menaces directes comme la chasse illégale et l’envahissement de leur territoire par les hommes, et indirectes, comme la pollution de l’environnement qui affaiblit leur système immunitaire. Il ne reste aujourd’hui en Arctique qu’environ 25 000 ours polaires. Si rien ne change, la banquise aura totalement disparu avant la fin du 21è siècle, et avec elle toute la population d’ours qu’elle compte. Accepterons-nous vraiment que notre planète se vide jusqu’à ce qu’il ne reste plus que nous, pâle reflet de la diversité de l’environnement ?
Seulement, il n’y a pas que des ours en Arctique, la population des renards polaires est elle aussi menacée d’extinction. Ces petits carnivores se nourrissent à 90% de lemmings, petits rongeurs d’Arctique, et sont très bien adaptés au froid. Cependant, à cause du réchauffement climatique, son cousin le renard roux, espèce de renard plus grande et plus forte, remonte petit à petit vers le Nord, envahissant les terriers de son cousin, chassant les mêmes proies, mais s’attaquant aussi aux renardeaux polaires. Face à cette compétition impitoyable, le renard polaire disparaît peu à peu des régions arctiques où s’est installé à ses dépends le renard roux. Si cette vague de mort continue, nous ne connaîtrons les renards et ours polaires que par leur figuration en peluche sur le lit de nos enfants.
Importante preuve des modifications de l’environnement de l’Arctique, la fonte des glaciers. Par exemple la fonte du glacier Petermann, situé au nord ouest du Groenland. Des scientifiques ont montré qu’il se fissurait de façon très importante depuis plusieurs années. D’énormes blocs de glace se détachent régulièrement. Au cours de la dernière décennie, le glacier a perdu plus de 150 kilomètres carrés de sa superficie initiale. Si la brèche de 16 kilomètres de long parvient jusqu’à la base du glacier, elle pourrait provoquer la dislocation d’une plaque de glace de 160 kilomètres carrés (soit l’équivalent de Manhattan) et environ 5 millions de tonnes de glaces se détacheraient. Pour se rendre compte du recul des glaciers, S.A.S. le Prince Albert II, en juillet 2005, a suivi les traces de son illustre ancêtre sur les glaciers « Lillihöök » et « Monaco ». Il a ainsi pu constater par Lui-même les conséquences du réchauffement climatique de la planète, le front du glacier Lillihöök ayant reculé de six kilomètres. Les spécialistes estiment que près de 40 % de son volume a fondu en un siècle. Ces fontes de glaciers sont des preuves irréfutables des menaces qui planent au dessus de l’environnement de l’Arctique. Laisserons-nous vraiment notre planète se fissurer en tous points, pareille aux maisons abandonnées fissurées car ignorées ?
Aussi, je suis sure que quand vous pensez à l’Arctique, vous ne voyez que de la neige, de l’eau et des ours, mais non ! Il y a aussi de la végétation ! D’abord, la “taïga”. Elle s’étend sur toute l’Eurasie, constitue le plus vaste ensemble forestier au Monde et joue un rôle majeur dans l’activité photosynthétique. En effet, la taïga est susceptible d’influencer largement le bilan de carbone planétaire en absorbant une partie de CO2 rejeté par nos activités.
Ces paysages végétaux sont caractérisés par des contraintes climatiques extrêmes et une période de végétation très courte. Les arbres les plus répandus sont des conifères, adaptés au froid, comme les épicéas, les pins et les sapins. Leur forme conique fait glisser la neige, leurs aiguilles couvertes d’un enduit cireux les protègent du gel et leur couleur vert foncé absorbe les rayons du soleil et favorise la photosynthèse. On trouve également des feuillus, comme les bouleaux, les saules et les peupliers. On note aussi la présence de marais, avec leurs végétations spécifiques. Seules les espèces qui ont besoin de ces quelques arbres peuvent survivre. On y trouve donc un nombre considérable d’oiseaux qui migrent vers cet habitat pour tirer profit des longues journées d’été et de la nourriture abondante en insectes durant cette saison. Y vivent aussi quelques oiseaux carnivores et omnivores, qui peuvent trouver des proies vivantes ou des carcasses. Mais peu de mammifères peuvent faire face aux durs hivers. Parmi eux l’élan, le lynx, le loup, le lemming, plusieurs espèces d’ursidés…
La toundra se différencie de la taïga surtout par sa flore, qui y est très modeste : on y rencontre des landes à arbustes avec de nombreuses espèces de saules herbacés nains, quelques arbres comme les bouleaux et des zones où la végétation est représentée par des mousses et des lichens. Toutes ces plantes ont une croissance ralentie en raison des conditions climatiques extrêmes. La faune est peu diversifiée mais très bien adaptée aux conditions de vie et assez semblable à celle de la taïga. Elle porte le plus souvent une fourrure ou un plumage épais et blanc en hiver, ainsi qu’une grosse couche de graisse pour se protéger du froid. S’y développent aussi des insectes comme les style moustiques.
Cependant, la taïga et la toundra sont elles aussi menacées par le réchauffement climatique, car on observe un autre phénomène avec la fonte de la banquise : la fonte du « pergélisol». Le pergélisol est un sol gelé en permanence qui s’est formé sur plusieurs milliers d’années.
Dans la taïga, la fonte du pergélisol menace les forêts de conifères. Ces arbres perdent leur stabilité, car c’est dans ce sol gelé que sont logées leurs racines. En perdant leurs fondations, les conifères basculent lentement avant de finir par s’effondrer, ce qui explique leur appellation « drunken trees », arbres ivres.
Dans la toundra, composée donc de végétation naine, la fonte du pergélisol provoque par endroits la libération de CO2 et surtout de méthane. Tous deux sont des gaz à effet de serre qui contribuent à renforcer plus encore le réchauffement climatique existant. Les milieux humides couvrent une surface de 2 millions de km² et contiennent environ 50 milliards de tonnes de carbone potentiellement susceptibles de se transformer en méthane. Mais je vous ai déjà parlé de ce catastrophique dégagement.
Les scénarios annoncent un accroissement de la taïga, au détriment de la surface de la toundra qui pourrait être réduite de 40 à 57% d’ici 2100, suite à la hausse des températures et à l’augmentation de la teneur en gaz carbonique. Comment en sommes-nous arrivés là ? Comment avons-nous pu ainsi provoquer ces changements d’environnement ? Comment pouvons-nous simplement penser que c’est normal, que nous en avons le droit ? Car quels droits avons-nous sur la Nature ? Est-il vraiment nécessaire de répondre ?
Aussi, à cause de la fonte des glaces, une quantité croissante d’eau douce est apportée dans l’océan Arctique. La diminution de l’épaisseur et de l’étendue de la banquise a déjà ajouté une grande quantité d’eau douce dans l’océan. En même temps, les cours d’eau y déversent jusqu’à 10% d’eau en plus qu’il y a un demi-siècle. C’est là en partie le résultat de l’augmentation des pluies, dues au réchauffement de l’air car l’air chaud peut contenir plus d’humidité, et en partie le résultat de la fonte du pergélisol, de la glace et de la neige. La fonte de la calotte glaciaire du Groenland libère également plus d’eau douce. Si l’Arctique se réchauffe encore, cette quantité d’eau douce augmentera d’autant plus.
Outre le risque de voir certains pays disparaître à cause de l’augmentation du niveau d’eau, cet ajout d’eau douce modifie l’environnement marin et les courants. Ainsi, les espèces marines de l’Arctique sont elles aussi menacées. Car de nombreuses espèces vivent dans l’océan Arctique : beaucoup de micro-organismes comme le plancton et le krill, base alimentaire de vertébrés et d’invertébrés, et des mammifères marins : plusieurs espèces de phoques et d’otaries, des morses, un nombre important d’espèces de cétacés à dents comme le béluga et le narval, et plusieurs espèces de cétacés à fanons comme la baleine à bosse et le rorqual bleu. Ainsi, toutes ces espèces aussi sont menacées par le réchauffement climatique.
Et bien que beaucoup d’espèces animales vivent en Arctique, des humains aussi s’y sont accommodés. Les principaux peuples sont les Inuits, installés du nord-est de la Sibérie au Groenland, en passant par l’Alaska et le Canada, les Sâmes, au nord de la Scandinavie et dans l’ouest de la Russie, les « Petits Peuples du Nord » de la Russie, qui regroupent une mosaïque d’ethnies plus ou moins affiliées entre elles (Évenks, Nénetses, Tchouktches, Aléoutes, etc.), et dont les populations sont peu nombreuses, et les Yakoutes en Russie, qui ne peuvent être classés dans les « Petits Peuples du Nord » du fait de leur importante population et dont un grand nombre vit en Sibérie arctique.
Ces communautés sont gravement perturbées par ces bouleversements. Pour certains Inuits, la chasse est, au-delà d’un moyen de subsistance, un véritable lien social, culturel et économique. La transformation forcée de ces sociétés traditionnelles est une véritable catastrophe. Dans les villes d’Arctic Bay et Igloolik, hameau inuit canadien, au Nunavut, le chômage dépasse les 20 %, l’alcoolisme est un problème grave et le taux de suicide est un des plus élevés au monde. De plus, la chasse étant en diminution, le passage de la nourriture traditionnelle à des aliments commerciaux a entraîné une augmentation des taux d’obésité et de diabète, notamment parmi les jeunes générations. Alors oui les jeunes américains et européens souffrent de l’obésité, mais les Inuits sont-ils moins importants ? En sommes-nous arrivés à dénigrer des êtres humains comme l’on dénigrait avant les pauvres ou les esclaves ? Les humains n’ont-ils donc pas évolué ?
Enfin, j’aimerais aborder un dernier point sur la biodiversité d’Arctique bouleversée par les activités humaines : des chercheurs se sont servis de marqueurs fossiles préservés dans les couches sédimentaires des lacs d’Arctique pour reconstituer les « tendances environnementales passées ». Ainsi, ils ont pu mettre en évidence une différence très importante entre la couche sédimentaire la plus récente et celle pré-industrielle, remontant à 200 ans, concluant que l’habitat aquatique actuel a beaucoup changé à cause de nous, pourtant à des lieux de l’Arctique. Le nombre de ce type de lacs va donc diminuer, et ils pourraient même disparaître, permettant le mélange de leur eau par l’action du vent. Ce changement s’accompagnerait assurément de modifications au niveau des diverses espèces vivant dans ces lacs. En plus, cela créerait surement une porte d’entrée pour des contaminants n’étant encore jamais entrés en contact avec ces environnements. Enfin, la fonte du pergélisol, qui assure l’étanchéité des lacs, entraîne assurément la disparition de ces lacs qui non seulement recèlent une biodiversité unique, mais procurent aussi aux communautés Inuits d’importants terrains de chasse et de pêche, ainsi que des sources d’eau potable en plus d’être une ressource clé pour certaines industries, telles que l’hydro-électricité, le transport et les ressources minières.
Qui sommes-nous pour nous autoriser à bouleverser les lois énoncées par la Nature lorsqu’elle a organisé la planète ? Qui sommes-nous pour nous donner le pouvoir de choisir ceux qui peuvent vivre et ceux qui doivent disparaître ? Qui sommes-nous pour imposer notre présence aux autres êtres-vivants ?
Pour conclure, j’ai envi de vous dire que même si ce qui se passe en Arctique nous paraît lointain, il n’est en fait que le prélude, déjà catastrophique, annonçant ce qui risque d’arriver sur toute la planète, et notamment si certaines personnes restent nombrilistes. Il me semble que c’est notre devoir d’agir contre les menaces qui planent au dessus de l’Arctique, dans le sens où les principales causes sont notre développement. Mais ce n’est pas sans espoir, et je pense, personnellement, que grâce à une prise de conscience de chacun et un geste venant de tous, à travers l’éducation des jeunes et des adultes, on aura l’espoir de retrouver l’Arctique comme il nous l’a été offert. Alors au lieu de laisser nos cœurs, comme des bateaux, se perdre en solitaire, nous devons nous unir pour payer l’addition, avant que celle-ci ne soit trop importante et les dégâts irréversibles.
Marine R.
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