Luciole (7°partie)
Salut !
Plus que deux jours avant les vacances ! Si seulement on pouvait être maître du temps…
Enfin, aujourd’hui je vous présente la suite de Luciole, j’espère qu’elle vous plaira.
Bye et bonne lecture.
1- Première partie 6- Sixième partie
2- Deuxième partie 7- Septième partie
3- Troisième partie 8- Huitième partie
4- Quatrième partie 9- Neuvième partie
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Luciole
Un caillou vient frapper contre ma fenêtre. Je me réveille en sursaut et m’approche pour voir qui est là. C’est Steve, Jud et toute la bande. Ils ont garé la voiture sur le bord de la route et l’un d’eux est descendu pour se planter devant mon immeuble.
Il fait nuit et il est une heure du matin. Je plisse les yeux pour essayer de discerner son visage mais sans succès. Néanmoins à sa voix il à l’air en colère, c’est surement Steve.
« Bordel qu’est- ce que tu fais ! Ca fait depuis une demi-heure qu’on poireaute au parking. Magne toi, on va être en retard ! »
J’enfile rapidement un pantalon et une chemise avant de crier par la fenêtre : « Désolé je dormais ! »
Je ne vois pas sa réaction car je lace mes chaussures mais j’imagine qu’il doit me prendre pour un cas irrécupérable à rester au lit au lieu de sortir fêter mon anniversaire. Je l’entends du hall d’entrée :
« Erwan ! T’as dix-huit ans réveille toi ! »
Je dévale l’escalier. Je ne sais pas pourquoi je cours, il n’est que sept heures et le soleil vient à peine de se lever. Mikaël ne sera pas à l’école avant huit heures et j’ai le temps. Pourtant je descends les marches quatre à quatre comme si j’avais le diable à mes trousses. Mais peut-être est-ce autre chose que je fuis. Ce cauchemar… Je passe en trombe dans la cuisine où Lucie est en train de prendre son petit déjeuner.
« Où vas-tu comme ça ?
- Au village. »
Je claque la porte derrière moi.
Un fin crachin commence à me mouiller le visage. J’enfourche mon vélo et m’engage sans plus attendre sur le sentier.
Très vite j’ai froid et au bout de dix minutes mes habits trempés me collent au corps.
Peut-être que j’essaie d’échapper à mes dix-huit ans. Peut-être au contraire que je cours vers mon futur.
Mais une chose est sûre; tout deux portent le même nom : Mika.
Je descends de voiture. Nous ne sommes encore que sur le trottoir mais les rires tonitruants des clients bourrés me parviennent sans mal.
Steve pousse la porte et on le suit dans le bar. Les conversations, la musique et les engueulades s’écrasent contre mon visage toujours à moitié endormi.
Jud passe son bras autour de mes épaules, à côté de lui j’ai l’air d’un frêle gamin.
« Cinq bières ! C’est moi qui paye. »
Dix minutes plus tard on en est déjà à notre troisième pichet.
J’ai mal au coeur, je supporte très mal l’alcool comparé aux autres. Peu de temps après je suis accroupi au dessus des cuvettes en train de vomir.
Comme anniversaire c’est pas super faut avouer, mais c’est ça ou rien. Les serveuses sont mignonnes et il y a une bonne ambiance cependant j’ai l’impression d’être un étranger, c’est pas mon milieu et c’est pas mon style de fille. Mais je ne vais pas le dire aux autres, ils se moqueraient de moi.
Je me lève, essuie ma bouche du coin de la manche et sort. Toute la bande est saoule. Certains se sont mis debout et dansent sur les tables, tanguant comme des bateaux à la dérive.
D’autres comme Jud et Steve se bagarre en cassant des verres. Dès qu’ils boivent ils deviennent agressifs, c’est pas de leur faute. C’est sur ça serait mieux s’ils étaient joyeux, mais bon il faut pas trop en demander non plus…
Je m’assoie à part près de la porte et je commande une autre bière.
Je ne pense pas que je sois ivre, j’ai juste mal à la tête et au ventre. Le problème c’est que j’ai conscience de ma faiblesse et de ma différence. Ils disent toujours ça les autres : « Ouai, mais toi c’est différent. »
Parfois je donnerai tout pour être comme eux, rire, me battre, grimper sur une chaise pour dire à voix haute ce que je ressens…
Mais je n’ai ni l’alcool joyeux ni l’alcool agressif; moi quand je bois, je deviens dépressif.
J’enfouis mon visage entre mes mains collantes. Plus personne ne fait attention à moi, je ne suis qu’un fantôme, miroir de mon échec et de ma solitude.
Je m’arrête. Devant moi se tiennent les maisons de pierres toutes bien alignées, serrées les unes aux autres, ainsi que ce petit panneau qui signale que j’entre dans le village : « Bienvenue. ».
Je me mets à trembler. Il pleut toujours et seules quelques souris se risquent dehors.
J’ai peur. Vous devez sûrement ne pas comprendre mais si je fais un pas de plus je ne serai plus rien comparé à eux, une fourmie qu’il suffit d’écraser.
J’ai l’impression qu’ils vont tous sortir en même temps pour m’entourer, m’oppresser tels les journalistes avec leurs micros et leurs questions.
Si j’entre je crains de ne plus être maître de moi-même. Je ne parle pas de refaire une crise, c’est autre chose. Quand cela m’arrive je ne contrôle plus mon corps mais ça ne me gène pas vraiment tant que je maîtrise encore mes décisions.
Cependant au milieu de la foule qui peut dire ce qu’on est capable ou non de faire ? Ils nous manipulent comme un boulanger pétri le pain, ils peuvent nous élever au rang de divinités ou nous inculquer que nous sommes des moins que rien.
En réalité j’ai peur de leur influence. Lucie, ce qu’ils nous font ce n’est pas mon esprit qui l’invente…
Plus j’y pense plus j’ignore ce qui m’effraie le plus; le village et ses habitants, ou mes dix-huit ans ? Lorsque j’ai quitté Etoile je croyais savoir, mais le doute resurgit toujours au moment le plus crucial.
Parfois je me dis que je ne pourrai pas éternellement fuir la foule; mais c’est dur d’ignorer qu’un jour j’ai eu dix-huit ans et qu’un jour j’ai été faible.
Je sais que je devrais avancer mais c’est comme si tous mes muscles se rappelaient ce qu’ils m’ont fait : je recule.
Soudain une main m’arrête et m’empêche de faire demi-tour pour m’enfuir.
Je sens un souffle chaud dans mon cou.
« Luciole…
- C’est moi. »
Elle m’attrape par l’épaule. Si je me retournais mes lèvres effleureraient surement les siennes; mais je ne peux pas elle me tient fermement.
« Avance n’ai pas peur. »
C’est plus facile à dire qu’à faire. Une question m’apparaît.
« Pourquoi es-tu venu ? Tu n’aurais pas dû quitter le phare. »
Je ne la vois pas mais je suis persuadé qu’elle sourit, probablement l’intuition après quatorze ans passés à ses côtés.
« Tu as plus besoin de moi que lui. »
C’est à mon tour de sourire avant de me raidir brutalement :
« Si on nous surprend ici, tous les deux, c’est pour le coup qu’on perd notre boulot. »
Elle ne répond rien. Elle a peur, je le sens; sa main est crispée autour de mon bras.
« Avance; si l’un de nous ne peut surmonter sa peur, il doit au moins aider l’autre à le faire.
- Pourtant tu es venue… »
Ses ongles s’enfoncent dans ma peau.
« Avance je suis là. »
Alors je fais un pas en avant.
posted on février 23rd, 2009 at 7 h 03 min
posted on avril 6th, 2009 at 7 h 51 min